Somme inscrite involontairement par erreur au crédit du compte courant d’associé du dirigeant : imposable
Une somme inscrite par erreur par une société au crédit du compte courant de son dirigeant, alors qu’il ne lui avait pas apportée, revêt un caractère occulte. En l’absence de réparation de cette erreur par la société avant la clôture de l’exercice, l’administration est fondée à imposer le dirigeant sur le montant de cette somme ainsi mise à sa disposition, même si l’erreur est involontaire, n’affecte pas le résultat de la société et a été rectifiée par la suite.
Les sommes inscrites au crédit d’un compte courant d’associé d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, alors même que l’inscription résulterait d’une erreur comptable involontaire, et ont donc, même dans une telle hypothèse, le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2° du 1 de l’article 109 du CGI.
Les faits
Une société, qui exerce une activité de marchand de biens et de promotion immobilière, a comptabilisé par erreur au crédit du compte courant d’associé de son dirigeant et associé unique, au lieu d’un compte de « débiteurs créditeurs divers », une somme de 20 000 € versée par une autre société sur l’exercice 2018, ainsi qu’une somme de 30 000 € versée par une personne physique sur l’exercice suivant, au titre d’avances en vue de la réalisation d’opérations immobilières. L’administration fiscale, à l’occasion d’une vérification de comptabilité, a imposé ces sommes entre les mains du dirigeant dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, ce qu’il conteste.
La décision
Le juge, après avoir rappelé la présomption de mise à disposition des sommes inscrites au crédit du compte d’associé posé par l’article 109, 1, 2° du CGI, relève qu’en inscrivant par erreur au crédit du compte courant de son dirigeant des sommes alors qu’il ne les lui avait pas apportées, la société a accordé à son associé unique un avantage revêtant, en l’absence de comptabilisation en tant que tel, un caractère occulte. Il décide que l’administration fiscale, en l’absence de réparation de cette erreur par la société, était fondée à imposer son dirigeant sur le montant des sommes ainsi mises à sa disposition, sans que puissent y faire obstacle les circonstances que cette mise à disposition a résulté d’une erreur involontaire, que cette erreur comptable, en l’absence de diminution de son actif net, n’a pu légalement donner lieu à des rehaussements du bénéfice imposable de la société, et que les sommes litigieuses ont été remboursées par cette société à ses créanciers au cours de l’année 2021.
L’impossibilité d’invoquer l’erreur comptable involontaire
Peu importe que l’erreur comptable invoquée ait été réelle et que la société ait corrigé l’erreur en déposant une déclaration rectificative. Le titulaire du compte ne peut échapper à l’imposition qu’en démontrant soit l’indisponibilité en droit ou en fait de la somme créditée, en raison notamment de la situation de trésorerie de la société, soit l’absence de qualification de revenu de la somme, par exemple lorsqu’elle a pour la société une contrepartie. Si la théorie des erreurs comptables permet à un contribuable de rectifier ses déclarations à son initiative lorsque l’erreur n’est pas intentionnelle, elle ne joue pas s’agissant des écritures concernant le compte courant d’associé. En effet, l’inscription d’une somme au crédit de ce compte entraîne par elle-même, fût-elle erronée, la possibilité pour l’associé d’appréhender cette somme, sauf convention contraire avec la société (CE 13-7-2011 n° 313541). Elle est donc considérée comme étant à sa disposition et ainsi imposable dès lors que l’erreur n’est pas corrigée avant la clôture de l’exercice.
CAA Nancy 16-10-2025 n° 23NC02405
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